Expositions

 

 

 

1660,

La Paix des Pyrénées, Politique et Famille.

 

 

Le musée Basque et de l'histoire de Bayonne présente, dans le cadre de 2016, Saint-Sébastien capitale européenne de la culture, une exposition sur le traité des Pyrénées et le mariage de Louis quatorze avec l'infante espagnole Marie-Thérèse en 1660. L'événement symbolise un moment clef de l'histoire de l'Europe : le passage de la primauté d'un pays à l'autre. La France de Louis XIV devient la première puissance du continent et ce pour deux siècles tandis que l'Espagne, malgré son immense empire colonial sur lequel « le soleil ne se couche jamais » entre dans le cycle infernal de la décadence. Tout cela semble bien loin aujourd'hui, mais il est parfois bon de rappeler l'état de notre continent en proie à une sorte de guerre perpétuelle avant l'intauration de la Communauté. C'est aussi l'occasion d'admirer une série de tableaux que l'on ne voit que rarement ici.

 

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L'exposition occupe l'espace dédié en temps normal à l'histoire de Bayonne. Un labyrinthe de salles un peu basses de plafond fait que les portraits en pied, grandeur nature, font face au visiteur à leur niveau, un peu comme des interlocuteurs, intimité n'est pas sans charme. Dessins, gravures, manuscrits, imprimés, tableaux retracent une histoire pleine de bruit et de fureur et on aura garde de se laisser abuser par l'impression de calme grandeur qui émane des oeuvres : ce mariage royal repose finalement sur des calculs politiques et financiers assez sordides où les sentiments, même la simple honnêteté, tiennent peu de place. Le jeune époux n'a en tête que sa conquête du moment, Mlle de La Vallières, quant à la dot fabuleuse qu'apporte la jeune femme tout le monde sait que l'Espagne est bien incapable de l'honorer – cela laissait le possibilité de revenir sur les promesses les plus solennelles... Effectivement un des petits-fils du couple devait devenir roi d'Espagne. Son lointain successeur règne encore sur le pays.

 

1660 3Le XVIIe siècle, s'il fut glorieux dans le domaine des arts et des lettres fut aussi et surtout un siècle d'airain. Forte de son homogénéité théologique grâce aux travaux du concile de Trente, l'église catholique entreprit de reconquérir les territoires perdus du fait de la Réforme. Les Habsbourg qui régnaient à Madrid, en Allemagne, à Prague et à Vienne, leurs clients - principicules italiens et allemands-, se déclarant défenseurs de l'orthodoxie, attaquèrent les puissances protestantes. Une guerre inexpiable de trente ans a alors ravagé l'Europe, on a parlé de « guerre civile » européenne. Les traités de Westphalie signés en 1648, mettaient fin aux hostilités, mais Français et Espagnols continuèrent. Il fallait bien en finir, l'Espagne était exsangue, et la France guère en meilleur état. l'idée était de doubler le traité de paix, dit des Pyrénées (1659), pour le rendre plud solennel, d'un mariage entre les deux dynasties. Il avait fallu attendre pour cela la naissance d'un rejeton masculin, le futur Charles II : Marie Thérèse, alors unique héritière de la couronne d'Espagne ne pouvait décemment épouser le roi du royaume voisin et ennemi. En ces temps, guerre et paix étaient affaire de famille. Rappelons que Louis XIV va épouser sa double cousine germaine : sa mère était la sœur du roi d'Espagne Philippe IV et la sœur de son père, était l'épouse de ce même souverain... L'exposition décrit le long cheminement des pour-parlers jusqu'à l'éclat des noces.

 

1660 5Dans ce jeu diplomatique, les arts tiennent une place de premier plan : cadeaux, portraits, fêtes, rencontres soigneusement organisées, entrées triomphales, dont il est rendu compts par des gravures que l'on diffuse etc. Si la cour d'Espagne avait comme peintre officiel Velasquez épaulé par un atelier prolifique, celle des Bourbon, en dehors de Philippe de Champaigne avec un Mazarin et un Louis XIII ici présents, devait se contenter de Nicolas Mignard, du charmant Nocret ou des prolifiques Beaubrun... Le portrait de Marie Thérèse, dont on pense que le visage a été peint par le maître, l'atelier se chargeant du costume et de la coiffure, domine quelque peu cette armée de personnages figés où les bijoux, les dentelles, les soies et les velours tiennent autant de place, sinon plus, que les visages. On comparera ce tableau avec celui peint quelques années plus tard par les Beaubrun et représentant la Reine en costume de bal tenant par la main le grand Dauphin enfant. On reconnaît bien le visage mais il est inexpressif ; tout l'effort des artistes s'est porté sur le richesse de la vêture. Ne leur reprochons pas, c'est ce qu'il leur était demandé. Éclate la supériorité de l'Espagnol qui, subissant les mêmes pressions, a su rendre l'air à la fois bougon et interrogateur d'une petite fille qui ne sait quel sera son destin ; malgré tout, elle esquisse un début de sourire.

 

L'amateur remarquera la présence d'un tableau insolite : véritable régal, il vient du château de Richelieu élevé aux portes de la ville que le cardinal avait fondée sur une terre familiale. Il s'agit d'une longue composition allégorique à la gloire d'Anne d'Autriche représentée comme une nouvelle Cérès, une personnification de la Terre et de la Fécondité. Elle est due à un petit maître lorrain, un maniériste attardé, au faire précieux, sinueux, nerveux, aux couleurs éclatantes émaillées, à la composition complexe et un peu obscure pour nous. Les petits personnages finement décrits, déclinent le thème en une multitude de scènes plaisantes. On remarquera en arrière fond un défilé d'animaux exotiques : crocodiles, éléphants, fauves etc. Une curiosité esthétique d'un charme certain et qui fait paraître bien lourde la composition allégorique d'un Nocret : Louis XIV, nouvel Alexandre, arrête son char de guerre dont les chevaux piaffent d'impatience pour rejoindre une Marie-Thérèse qui lui tend les bras, tandis qu'un essaim d'amours virevolte tout autour occupés à souligner le sens de la scène au cas où on ne l'aurait pas compris.

 

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Impossible de tout dire d'une exposition qui est plus que la simple relation d'un événement historique. Elle donne un visage vivant à tant de personnages qui ont peuplé l'histoire et la littérature. Un exemple ? Le portrait du jeune Louis XIV en armure, toujours par Nocret mieux inspiré ici : un tout jeune homme et non la momie couverte de soieries, de velours, de diamants, juchée sur d'invraisemblables talons hauts, coiffée d'une abondante perruque, bouffie de suffisance et de morgue que l'histoire a retenue. C'est celui des romans d'Alexandre Dumas et, plus près de nous, celui de Jean d'Aillon.

 

Gilles Coÿne

 

 

 

 

 

 

1 - Jacques Laumosnier, Mariage de Louis XIV et de l'Infante Marie-Thérèse à Saint-Jean-de-Luz, le 9 juin 1660, commandé par le Maréchal de Tessé ambassadeur à Madrid, 1720, Musée de Tessé, Le Mans © Dominique Pouzin / Photo-musées du Mans.

2 - Jean Nocret (1615 - 1672), Louis XIV jeune en armure, © Museo del Prado, Madrid, photo de l'auteur.

3 - Velasquez et atelier, Portrait de l'Infante Marie-Thérèse, Musée du Louvre, Paris, © Musée du louvre, 

4 - Claude Deruet, Nancy, vers 1588-1660, La Terre (allégorie d'Anne d'Autriche), détail du centre de la toile, Orléans, © Musée des Beaux-Arts

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1660

Avec la Paix des Pyrénées, Politique et Famille

Musée Basque et de l'histoire de Bayonne

Jusqu'au 25 septembre 2016

37, quai des Corsaires, 64100 Bayonne

- Téléphone : 05 59 59 08 98

- Internet : www.musee-basque.com

- Horaires et tarifs : Tous les jours sauf lundis et jours fériés de 10h à 18h30 (Juillet et août tous les jours de 10h à 20h30). Gratuit pour les moins de 26 ans, le premier dimanche du mois et pour les journées du patrimoine les 15 et 16 septembre. Tarifs : 6,5€ et 4€, groupe de plus de 15 personnes 4€.

- Publication : Livret de 26p., 3,5€