Expositions
Cai Guo-Qiang
Travels in the Mediterranean
Cai Guo-Qiang a sans doute gardé de sa formation à l'école de théâtre de Shanghai le goût d'un travail collectif mobilisant toutes les énergies pour la création : ainsi la galerie menant à la première oeuvre Travels on the Mediterranean expose les carnets de dessins d'une jeune étudiante – Yuting Zhang - qu'il a faite venir de Shanghai. Il s'est nourri de ses charmants dessins sur Nice et la Côte d'Azur pour en extraire sa propre interprétation.
L'oeuvre en elle-même, une sorte de fresque (si on peut employer le terme ici) faite à le poudre à canon, se présente comme un immense panorama que reflète une mer faite d'eau et d'huile d'olive. On y reconnaît la végétation luxuriante de la Côte d'Azur, les constructions tarabiscotées de la belle époque, les silhouettes féminines offertes au soleil... Comment ne pas penser à ces grands rouleaux peints relatant les chasses et les expéditions des empereurs Qing au XVIIIe siècle? On retrouve ici aussi le sens d'une narration en continu, la figuration d'un paysage stylisé à la perspective multiple. On remarquera enfin l'utilisation de produits locaux, en l'occurrence l'huile d'olive et l'eau pour le plan liquide, démarche inspirée de celle du Land Art. La pratique de Cai Guo-King est multiple et, comme notre Molière, il prend son bien où il le trouve.
Une vidéo, qu'il faut regarder jusqu'au bout, décrit le processus créateur : Dans un lieu couvert très allongé (les anciens abattoirs de Nice), devant une assistance qui applaudit ce qu'il faut bien appeler une performance, les assistants du maîtres - des étudiants de l'école d'Arts Appliqués Orbicom de Nice - déploient un immense rouleau de papier sur lequel seront disposés les pochoirs exécutés à partir des cartons du créateur, des branchages, quelques objets.
On s'attardera un peu sur la façon dont le maître réalise ses figures humaines : il dessine à partir de leur ombre projetée les modèles, nus, disposés sur des échafauds, en des positions aussi contournées qu'inconfortables. Ombres chinoises ? De manière plus sophistiquée et sérieuse, on songera au mythe grec de Dibutade, cette jeune femme qui dessina l'ombre de son amant avant son départ pour un long voyage, mythe où les Grecs anciens voyaient l'origine de la peinture : au commencement était le dessin... Ces silhouettes, transformées en pochoirs, seront elles aussi disposées sur le rouleau de papier. Puis les assistant saupoudrent les calques de poudre à canon, couvrent le tout de grands cartons que des briques maintiendront et le feu est mis. C'est à la fois ludique, un peu inquiétant – heureusement l'abattoir est construit en béton – et finalement intrigant. C'est surtout intéressant par ce mélange de maîtrise et de hasard.
Cai Guo-qiang, s'adresse à tous dans un langage aisément compréhensible. On ne cherchera pas ici une incitation à l'introspection, à la recherche de soi, non plus qu'une remise en cause du monde tel qu'il va. Il délivre un message spectaculaire sur les valeurs universelles de bonheur, de fraternité qui suscitent l'adhésion. Sa scène c'est la Terre, un jour, Tokyo ou Hiroshima, un autre New York, Paris, Londres, Venise... Saluons la générosité de sa démarche.
Gilles Coÿne
Black Fireworks : project for Hiroshima, 25 octobre 2008, 13h, durée 60s. © Photo Seiji Toyonaga/ Hiroshime city Museum of Contemporary Art.
Travels in the Mediterranean, vue de l'installation au MAMAC © Ville de Nice / Muriel Anssens
Reflexion – Agift from Iwaki 2004. © On-Works International Multimedia / collection Faurschou
Cai Guo-Qiang
Travels in the Mediterranean
Jusqu'au 9 janvier 2011
Musée d'Art Moderne et Contemporain – 1r étage
Promenade des Arts, Nice
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h, entrée libre.
Tél. 04 97 13 42 01
Internet : www.mamac-nice.org
Publications : Une fiche illustrée - recto en français, verso en anglais - est mise à la disposition des visiteurs ; Un catalogue est prévu qui n'est pas encore en vente au jour de cette critique.